Khaled Nouri prend le poste de Kamel Feki, un proche du président tunisien, et Malek Zahi a été écarté des affaires sociales. Ce remaniement survient à la suite de multiples arrestations dans la société civile qui font craindre un nouvel affaiblissement des libertés en Tunisie.
Le président de la République tunisienne Kaïs Saïed a surpris tout le monde en effectuant un remaniement ministériel inattendu samedi dernier. D’après un communiqué de la présidence, Khaled Nouri remplace Kamel Feki au poste de ministre de l’intérieur. Ce dernier est pourtant considéré comme un proche du président.
Le technocrate Kamel Madouri devient pour sa part le nouveau ministre des affaires sociales. Il succède à Malek Zahi, un autre proche de Kaïs Saïed. De plus, un poste de secrétaire d’Etat a été ouvert au ministère de l’intérieur. Il est confié à Sofiene Ben Sadok qui veillera à la sécurité nationale.
Ce remaniement intervient après l’arrestation d’une dizaine d’avocats, de journalistes et de militants des droits humains. La France, l’Union européenne et les Etats-Unis ont exprimé leur « inquiétude » et leur « préoccupation » face à cette vague d’arrestations. Face à cela, le Kaïs Saïed a regretté « une ingérence étrangère inacceptable ».
Il y a cinq jours, à Tunis, des centaines de manifestants membres d’associations de la société civile ont scandé « à bas la dictature » et ont dénoncé un retour à un « Etat policier » semblable à la dictature de Zine El-Abidine Ben Ali, mise en place durant 23 ans. Ben Ali avait été renversé en 2011 lors du printemps arabe. Les manifestants ont critiqué le président Saïed, élu démocratiquement en octobre 2019, mais qui s’est emparé des pleins pouvoirs grâce à un coup de force à l’été 2021. « Kaïs ô dictateur, ton tour est venu », pouvaient-on lire sur les pancartes.
Mercredi 21 mai dernier, deux chroniqueurs renommés à la télévision et à la radio, Mourad Zeghidi et Borhen Bssais, ont été condamnés à un an de prison après avoir dénoncé la situation socio-économique de la Tunisie. Une lourde peine émise en vertu d’un décret-loi sanctionnant les « fausses nouvelles ».
Leur arrestation le 11 mai s’est effectuée en même temps que celle de l’avocate Sonia Dahmani, qui avait ironisé à l’occasion d’une chronique télévisée sur la possibilité que les migrants subsahariens aient envie de rejoindre la Tunisie, alors que le pays est frappé par une grave crise économique.
Deux jours plus tard, l’avocat Mehdi Zagrouba à quant à lui été arrêté par la police et, selon la Ligue tunisienne des droits de l’homme, roué de coups au commissariat. La Ligue et l’Organisation mondiale de lutte contre la torture (OMCT) ont exigé une expertise médico-légale concernant les « sévices » que Mr Zagrouba aurait subis.