Mauritanie : l’hydrogène vert entre progrès réglementaires et freins techniques

Maghreb

La Mauritanie se lance dans une aventure énergétique ambitieuse avec l’objectif de produire 12 millions de tonnes d’hydrogène vert d’ici 2035, grâce à ses ressources abondantes en énergie solaire et éolienne. Ce projet vise également à développer une production locale d’acier vert et d’ammoniac, renforçant ainsi la chaîne de valeur industrielle du pays. Malgré un cadre réglementaire prometteur, les défis techniques et opérationnels restent nombreux.

Un cadre réglementaire pionnier en Afrique

Le 9 septembre dernier, la Mauritanie a adopté le premier code de l’hydrogène vert sur le continent africain, un texte conçu pour sécuriser les investissements étrangers et offrir un environnement favorable à ce secteur émergent. Selon Taghiya Abeiderahmane, directrice de l’hydrogène bas carbone au ministère de l’Énergie, ce code offre « flexibilité et adaptabilité face aux évolutions technologiques et de marché, tout en garantissant la sécurité des développeurs ».

Cette réglementation est une étape essentielle pour des projets d’envergure comme le projet Nour. Dans sa phase initiale, ce dernier prévoit une capacité de 1,6 gigawatt d’électrolyse pour produire 150 000 tonnes d’hydrogène vert par an. Laurent Coche, PDG de Chariot, co-développeur du projet avec Total-EREN, voit dans ce code une opportunité de négocier des conventions d’investissement adaptées, incluant des accords sur le régime fiscal, l’accès aux terrains et le partage d’infrastructures.

Des ressources naturelles prometteuses

Les premières études, rendues en février, ont confirmé un fort potentiel éolien sur la côte nord de la Mauritanie. Ces ressources pourraient être mobilisées pour réduire le minerai de fer local, actuellement exporté via le port de Nouadhibou, sans passer par des procédés à haute intensité de carbone comme le charbon.

Les défis techniques du projet

Malgré des ambitions affichées, le développement des électrolyseurs à grande échelle reste un défi majeur. « Les premiers essais industriels, autour de cent mégawatts, montrent encore des limites de maturité technique », explique Ludovic Leroy, ingénieur à l’IFPEN. Il souligne les retards rencontrés par des projets similaires, comme celui de TotalEnergies et Engie en France, qui a dû être repensé avec une autre technologie.

En Mauritanie, un autre défi majeur est l’approvisionnement en eau pure pour alimenter les électrolyseurs. Le pays devra dessaler l’eau de mer, une opération énergivore et coûteuse, qui nécessitera des infrastructures adaptées et une expertise technique accrue.

Une vision à concrétiser

La Mauritanie avance à grands pas sur le plan réglementaire et se positionne comme un acteur clé dans la transition énergétique en Afrique. Cependant, la concrétisation de cette vision dépendra de la capacité à lever les obstacles techniques et logistiques. En parallèle, la formation de main-d’œuvre qualifiée et le développement d’infrastructures spécifiques seront déterminants pour transformer cette ambition en réalité.

Avec ces initiatives, la Mauritanie aspire non seulement à diversifier son économie, mais aussi à devenir un leader régional dans les énergies renouvelables et la production d’hydrogène vert.