Moins d’un an après l’extinction du virus Ebola, un vaccin est à l’essai depuis le 31 mars en Guinée. Dans ce pays qui a lourdement été touché par l’épidémie de 2014 à 2016, les initiatives se multiplient pour prévenir l’apparition d’une nouvelle catastrophe sanitaire. Le groupe Rusal, très présent dans le pays, a par exemple financé la construction d’un laboratoire de recherche qui « permettra aux scientifiques – chercheurs de faire des analyses de laboratoire en toute sécurité ».
Une mobilisation tardive
Au moins 11 315 morts, 22 000 orphelins et 1,8 milliard d’euros de pertes, dont une immense majorité au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée. Voici le bilan officiel de l’OMS après la dernière épidémie d’Ebola, qui a sévi principalement dans ces trois pays d’Afrique de l’Ouest entre 2014 et 2016.
Mais surtout, la propagation du virus a créé une psychose planétaire. En effet, après l’apparition de plusieurs cas hors du continent africain, le risque d’une catastrophe sanitaire mondiale a été largement évoqué. L’annonce fin décembre 2016 par l’OMS de la mise au point d’un vaccin efficace à 100 % contre la maladie a donc résonné comme un grand soulagement.
C’est en Guinée que ce vaccin a été testé pour la première fois sur un groupe de 600 personnes. Vaccin dont la deuxième phase démarrait le 31 mars dernier. Et c’est dans ce même pays que la maladie s’est déclarée fin 2013, dans le village reculé de Meliandou, tout près de la frontière avec le Liberia et la Sierra Leone.
Découvert en 1976 sur les rives du Zaïre, le virus Ebola comptait déjà à son actif 24 épisodes épidémiques en 37 années d’existence. Mais jusque là, la fièvre hémorragique fulgurante, qui trouve son origine dans un ver, n’était responsable « que » de 1546 décès, d’où un niveau de vigilance (trop) bas.
Mais le 23 mars 2014, après avoir constaté des dizaines de décès suspects dans la campagne guinéenne, les autorités du pays déclenchent l’alerte : l’épidémie d’Ebola est déclarée. Et pendant l’été de la même année, l’épidémie connaît un regain mortel au Libéria et en Sierra Leone, avant de s’étendre à l’Espagne, où survient, le 12 août 2014, le premier décès hors d’Afrique.
C’est à partir de ce moment-là seulement que la communauté internationale s’est emparée du problème, lançant alors un appel aux dons, qui a atteint plus de 3 milliards de dollars, et en renforçant l’aide humanitaire dans les régions touchées. Margaret Chan, directrice de l’Organisation mondiale de la Santé, a d’ailleurs reconnu avoir trop tardé à réagir : « L’Afrique de l’Ouest était confrontée à sa première expérience du virus… Le monde, y compris l’OMS, a été trop lent à voir ce qui se déroulait devant nous ».
Un épisode riche d’enseignement
Après ce coûteux « raté », l’épidémie durera encore un an et demi, avec même quelques cas supplémentaires détectés jusqu’à l’été 2016. Alors, pour éviter une nouvelle catastrophe humanitaire, plusieurs initiatives ont depuis vu le jour en Afrique, comme à Kinshasa (République démocratique du Congo), où une formation sur Ebola a réuni les spécialistes de huit pays africains du 4 au 14 mars derniers.
Mais c’est en Guinée, que se concentre aujourd’hui l’attention internationale. En marge des essais de vaccin à Conakry qui se déroule sous le parrainage de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), et qui devraient permettre la fabrication des premiers sérums contre le virus à partir de 2018, le groupe Rusal a inauguré le 15 février un laboratoire de recherche scientifique destiné à lutter contre les maladies infectieuses.
Installée au Centre de recherche en épidémiologie, microbiologie et soins médicaux (CREMS) déjà construit en 2015 par la multinationale russe pour combattre Ebola, cette nouvelle infrastructure doit permettre dans un futur proche de diagnostiquer les infections dangereuses qui pourraient menacer le peuple guinéen et ses voisins. « L’ouverture d’un nouveau laboratoire doté d’équipements uniques, y compris pour la Russie, va empêcher la propagation des maladies dangereuses pour la vie de la population locale », s’est d’ailleurs réjoui Vladislav Soloviev, directeur de Rusal, qui a investi plus de 10 millions de dollars dans le projet.
Durant ce triste épisode, la Guinée a reçu de nombreux soutiens. Ce ne sont pas moins de 74 entreprises privées qui ont participé à la lutte contre le virus via des dons. Parmi elles, Coca-Cola, Caterpillar, Johnson & Johnson, UPS ou encore ArcelorMittal qui ont chacune donné entre 40 et 135 000 euros. Et encore aujourd’hui, alors que l’épidémie est éradiquée, le pays peut encore compter sur plusieurs acteurs présents sur place comme l’Inserm ou l’entreprise Rusal pour faire en sorte qu’une telle situation ne se reproduise pas. Non contente d’avoir mis un terme à ce fléau, la Guinée affiche désormais la volonté de prévenir plutôt que de guérir.